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LE BAS-RELIEF DES PONTS JUMEAUX

Un symbole des Canaux des 2 mers

Par Lougabier • BaB 2 mers • Mardi 18/10/2016 • 0 commentaires  • Lu 3139 fois • Version imprimable

  • Currently 5/5

Note : 5/5 (1 note)

 
Ci dessous, le de l'Embouchure ou les Ponts-Jumeaux de Toulouse, vu du bord :


C'est un noeud de la navigation méridionale :
- 1667 : Embouchure de la Garonne, aujourd'hui comblée.
- 1667 : Départ du du , au centre
- 1776 : Jonction avec le de Brienne ou Saint Pierre ( à droite)
- 1856 : Départ du de Garonne (PK0), à gauche

Le cardinal Etienne-Charles de Brienne (1727-1794) est à la tête de la province du Languedoc, c'est un grand bâtisseur qui la "médiatisation" de sa région. En 1772, le sculpteur toulousain François Lucas (1736-1813) propose aux Etats du Languedoc un bas-relief qui célèbre la jonction de la Garonne supérieure, via le nouveau C St Pierre, au du .

Pour clarifier la situation, un extrait de la carte cavalière, dite de Tavernier (1631), soit 35 ans avant la signature de l'Edit de construction du Royal des 2 mers.


Il est à noter que les bateaux, pour franchir la chaussée empruntent un passelis. Ces passages très difficiles, étaient un frein important à la navigation tant pour leurs franchissements que pour les dimensions des bateaux et de leurs charges.

La photo n'existant pas, on peut voir les 2 ponts identiques sur cette assiette sortie des fours entre 1825 et 1832. Il s'agit des Ponts-Jumeaux, le Latéral n'étant pas encore creusé, on ne parle pas de triplet !  
Ils ont été construits par le toulousain Joseph-Marie Saget (1725-1782) à qui l'on doit aussi les magnifiques quais de la Garonne.

  

Ces ponts à anse de panier, comportent un bandeau arrondi en pierre tout le long de l'ouvrage. Leur clé de voûte est aussi en pierre de taille, ainsi qu'un contrefort de chaque côté de l'arche.

Le bas-relief  de 16 mètres de long sur 5 de haut, est situé entre les 2 ponts jumeaux, sur un terre-plein arrondi.
On peut le décomposer en 3 parties principales.


Ce monument fera la fierté des "gens de l'eau" et sera un des principaux symboles des Canaux du . On le retrouvera sur beaucoup de documents comme par exemple à l'intérieur des dépliants édités par le Consortium (1)  et l'ATFM (2). 

              


Le Bas-relief est aussi emblématique pour la ville de Toulouse. On le retrouve à l'intérieur du Palais Consulaire, il est à remarquer que la CCI a toujours soutenu les Canaux du .



Dans la salle des "Illustres" du Capitole (Hôtel de Ville), un grand tableau  représente la visite du par le Cardinal Brienne.
Cette oeuvre a été commentée en janvier 2015 dans un article de la Dépêche du .
 
 

On voit que François Lucas dispose d'au moins 3 compagnons et que la scène attire les badauds. Tout en bas, on reconnaît les symboles des dans le "sapinou", la gaffe et l'aviron.

Ce monument a été réalisé en marbre de Carrare (Italie), acheminé par navire jusqu'à Agde puis par bateaux de jusqu'à sa destination. Il est fixé sur de la pierre de Carcassonne, transportée aussi par barques. Il fût envisagé de la sculpter aussi, mais elle s'est avérée trop friable. Il a été terminé en 1775 et le mis en eau en 1776.

Quelques messages apparaissent sur ce bas-relief.

1. 1ère partie : les Etats du Languedoc.

Au centre les financeurs !! La Province est personnifiée par une femme. Elle tient la barre d'une barque comme les rennes de la région. La croix du Languedoc ou d'Occitanie montre l'armateur, ( c'est qui le patron ??)... Elle ordonne à 2 petits Génies de creuser le de Brienne pour relier la Garonne, de la Porte du Bazacle jusqu'au Royal. Ceci permettra de contourner la chaussée du Bazacle et d'améliorer le commerce entre la Garonne supérieure et le du . (Voir plan Tavernier).


Ci dessous, extraits du projet présenté en 1772 par Lucas et la modification  proposée (en jaune sur le dessin), en 1773-74. Les oliviers rajoutés montrent la richesse, la douceur du climat et le bon-vivre Occitan.

 

Ils sont à comparer à l'actuel bas-relief.


2. La Garonne :

Elle est représentée par une femme  qui tient une corne d'abondance et encourage ou regarde avec bienveillance le Génie du Labour.



A la première esquisse, Dame Garonne tient un aviron dans sa main droite, dans la deuxième, c'est une corne d'abondance.

 

Un impact de balle a atteint le bras droit du Génie du Labour, est-ce durant la bataille de Toulouse ou à la libération de Toulouse en août 1944 ? Voir :

http://bab.viabloga.com/news/10-avril-1814-le-canal-du-midi-meurtri



 

3. Le du :

Lui, c'est l'Homme !



En 1772 dans le 1er projet, il tient aussi un aviron comme la Garonne, peut-être une de symétrie ? dans la deuxième, son bras repose sur l'urne d'ou le verse. S'agit-il du "réservoir" de St Ferréol ?

 

Quelques détails supplémentaires (vu par un "canalou" et pas un historien ! ) : 

- Le bateau représenté est sans doute un "ancêtre" des Barques du . Il dispose d'un "carré". Cette voile était encore utilisée pour soulager les chevaux jusqu'à la motorisation des bateaux (1935 pour les derniers).
- L' : la manoeuvre des portes en bois se faisait par un levier. L'eau qui s'échappe par une vanne court sur un "éperon" . 




Le détail ci dessous représente Toulouse. On doit y retrouver les clochers de St Sernin, des Jacobains, etc., les seuls édifices qui dépassaient des murailles ! 
La porte représentée paraît être celle du Bazacle, PK0 du St Pierre appelé sans doute comme ça, car il part du quartier St Pierre, plus tard ce sera le  de Brienne, nom de son initiateur. 



En 1775,  nouvelle proposition : on avance le monument en l'appuyant sur une colonne de façon à pouvoir faire le tour. Pour le rendre plus visible, Lucas suggère de le surélever  au niveau du parapet...

 
 
Remarques : 
- On retrouve ce genre de colonne dans le lac de St Ferréol qui sert à mesurer la hauteur d'eau dans le lac.
- Plus tard, les descendants de Riquet ont construit une colonne au seuil de Naurouze, peut-être s'en sont-ils inspirés ?

Cette proposition n'est pas retenue, le monument restera dans l'état qu'on lui connaît aujourd'hui.

A partir de 1775, ce monument va traverser l'histoire du pays : la Révolution Française, la Bataille de Toulouse en 1814, la Restauration, la Libération de Toulouse en Août 1944, etc..

Entre 1906 et 1909, le bas-relief est restauré par le sculpteur toulousain Camille Raynaud. Les visages sont refaits à cette occasion. Durant cette opération, le monument est "cabané".

Le du Vieux-Toulouse a exposé des documents de cette rénovation en 2004 "....qui s'est déroulée en 3 phases : diagnostic, restauration, consolidation., pour passer d'une fresque noircie et érodée sur laquelle les algues et les lichens s'implantaient, à une fresque magnifiquement restaurée..."


La Société Archéologique du de la France, dans sa séance du 9 novembre 1994, regrette les dégradations du monument :

 



Pour les fêtes du , une "restauration légère" a été réalisée en 2013. Un article avait été mis en commentaire dans un article sur le des Ponts-Jumeaux.

.
Et pour terminer, une petite anecdote !!

Vers 1965, on attendait de débarquer de la pyrite au de l'Embouchure  Alors que d'habitude, ce coin n'était fréquenté que par des mariniers et des pêcheurs, on s'est étonné de voir dès le matin de bonne heure, des groupes de gens qui fouillaient le bas-relief.  Renseignements pris, c'était des candidats au "Jeu radiophonique des 1000 francs" de France-Inter qui recherchaient l'enveloppe cachée dans un monument toulousain, pour participer à l'émission sous le chapiteau Pinder...

La fresque de Lucas, preuve qu'elle est incontournable pour les mariniers du , figure dans plusieurs articles de BaB :

http://bab.viabloga.com/news/le-bassin-des-ponts-jumeaux
  http://bab.viabloga.com/news/histoire-fragmentaire-des-bp-du-midi-dont-un-deviendra-le-cid-3

http://bab.viabloga.com/news/midi-dragage-du-bassin-des-ponts-jumeaux



(1) Le Consortium :  Le Consortium pour la Défense des voies navigables du Sud-ouest et du de la France. C'était une émanation de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Toulouse, son siège était à la même adresse que la CCI.

(2) ATFM : Association des Transporteurs Fluviaux du . Cet organisme avait pour adhérent la CTF (Coopérative des Transporteurs Fluviaux) qui représentaient les artisans, la CFM (Compagnie Fluviale du , filiale de la CGN-HPLM) et Citerna pour les pétroles. 











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