Voici, pour se faire une idée, ce qu'écrit Guillaume Séchet sur le site meteo-paris.com au sujet de cet hiver-là :
Du 24 janvier au 21 février 1929, la France (et une grande partie de l’Europe) connaît sa plus grande vague de froid depuis 1879 (notamment dans le Nord-est où le déficit moyen de température atteint 9°).Le froid s’intensifie progressivement dans l’Est du pays du 24 janvier au 10 février, puis il déferle partout, jusqu’au 21 février. (...)De nombreuses rivières Françaises sont entièrement prises par les glaces, la couche atteignant parfois 0,80 à 1m d’épaisseur ! La Somme est par exemple entièrement gelée à Amiens, la Meuse est entièrement figée ainsi que l’Aisne à Rethel, l’Yonne et la Seine en amont de Montereau, la Loire et le canal à Roanne, une bonne partie du Rhône (entre Lyon et Genève) ainsi que la Saône. Si à Paris, la Seine se borne seulement à charrier des glaçons, sans complètement être prise comme elle le fut en 1879, c’est que des mesures très sérieuses sont arrêtées pour empêcher l’embâcle. On baisse les barrages et le fleuve atteint un niveau tellement bas qu’un peu partout on peut apercevoir le fond de son lit !
Et un article paru dans L'Est Républicain, en date du vendredi 15 février 1929, sur la situation de la navigation fluviale, arrêtée depuis plus d'un mois (kiosque-lorrain.fr) :
LE FROID et la navigation fluviale
Ça continue.
Le froid ne veut pas désarmer. Simple changement de décor dans la journée de jeudi.
Pas de bise glacée; pas de soleil non plus; mais une neige fine, abondante... et triste !
L'espoir qui, un instant, nous avait réchauffé le cœur, a cédé la place à une nouvelle inquiétude.
Que faire ?
Nous résigner.
Nous avons parlé hier des nombreuses et graves perturbations apportées par l'abaissement de la température dans la circulation des trains.
Là ne s'arrêtent pas les difficultés.
Les voies fluviales, complément indispensable des voies ferrées, subissent, elles aussi, et d'une façon plus rapide, plus brutale, les atteintes du froid.
Et la situation créée par ce dernier dans ce domaine essentiel de l’activité économique, pour n'être pas désespérée, n'en demeure pas moins très sérieuse.
On en pourra juger par les renseignements que nous avons pu recueillir, grâce à l'amabilité de la direction des services de la Compagnie générale de navigation Le Havre-Paris-Lyon-Marseille, quai Saint-Georges (à Nancy).
Un premier arrêt de la navigation s'est produit, du 21 au 27 décembre 1928, sur tout le canal de l'Est branche sud, et dans la région de Réchicourt, canal de la Marne-au-Rhin.
Il coïncidait avec les premières morsures du froid. Mais on pensait qu'il s'agissait là d'une alerte, sans plus.
Il n'en fut rien, hélas !
Aujourd'hui, depuis le 4 janvier, pour préciser, les glaces ont amené un arrêt complet du trafic maritime.
Celui-ci est paralysé sur :
- Le Canal de l'Est, branche sud, de Toul à Corre (Haute-Saône) ;- Le canal de la Marne-au-Rhin, de Vitry à Strasbourg ;- Le canal latéral de la Marne, de Vitry à Dizy ;- Le canal de l'Aisne à la Marne, de Condé-sur-Marne à Berry-au-Bac ;- Le canal latéral de l'Aisne et le canal des Ardennes :- Le canal des Houillères et la Sarre;- Le canal du Rhône au Rhin ;- Le canal de la Marne à la Saône ;- Le canal de l'Est, branche nord, et Meuse canalisée.
On le voit, c'est toute une région qui souffre dans son essor. Depuis le 7 janvier, aucun bateau, chaland ou péniche, n'a plus circulé sur les voies précitées.
L'épaisseur de la glace qui recouvre le canal varie de 30 à 50 centimètres, suivant l'exposition des biefs.
Le 9 février, la Saône a été prise sur toute sa largeur par 10 centimètres de glace ; et elle conserve sa rigidité.
De son côté, la Marne commence à suivre le mouvement et charrie des glaçons.
Bref, c'est une paralysie générale, et qui menace de s'accentuer si la température ne s'améliore pas.
Les houilles de la Sarre, les charbons de la Ruhr, en provenance de Strasbourg, les charbons belges, ceux des mines du Nord n'arrivent plus.
Le blé, la farine et toutes les marchandises qui nous étaient apportées par bateau sont en panne.
Les soudières Solvay, Saint-Gobain et Marcheville-Daguin ne peuvent plus alimenter leurs usines en calcaire, par les voies d'eau gelées.
Qu'adviendra-t-il demain ? Telle est la question angoissante que se posent les milieux compétents.
Un bateau, portant 280 tonnes de marchandises, c'est-à-dire ce que portent eux-mêmes les 28 wagons de 10 tonnes d'un train, comment ferait-on si, par malheur, le trafic ferroviaire venait à être complètement suspendu ?
Actuellement, on compte sur lui pour suppléer à la carence maritime.
Nous avons montré dans quelle mesure et avec quelle infatigable énergie nos cheminots assurent leur service. Mais les machines disposent-elles de ce levier tout puissant, qu'est la bonne volonté ?
Les heures à venir sont chargées de mystère.
C'est pourquoi, malgré la situation présente, malgré les surprises agréables ou fâcheuses que peuvent nous réserver les jours prochains, il ne convient pas de s'hypnotiser, mais au contraire de réagir, chacun dans sa sphère, contre les rigueurs du temps.
Attendons !...
...Sur le canal gelé où tombe uneclarté polaire, les chalands, longs etnoirs, dorment, appesantis...
Raoul DÉCELLAS.
Dans une deuxième partie, nous verrons comment la navigation a pu reprendre... À retrouver en suivant ce lien : bab.viabloga.com/news/l-hiver-1929-a-ete-froid-2e-partie.
Impressionnant cette glace.
A Toulouse, il faisait moins froid même si c'est descendu en dessous de 0°.
Ci joint extraits de l'Express du Midi :
Le Canal du Midi n'a pas dû geler.