Coupé à son extrémité maritime, c'est un canal oublié qui se termine de nos jours en cul de sac. Il porte aujourd'hui le nom de "Canal d'Arles à Fos", mais nous l'avons fréquenté avant toutes les modifications sous le nom d'"Arles à Bouc"...
Les Romains avaient commencé à en réaliser un, puis de nombreux projets ont été faits et finalement sa réalisation a été tardive et presque contemporaine avec le train.
Il faut reconnaître que la nature tantôt très dure, tantôt sablonneuse et vaseuse, soumise aux crues du Rhône, n'a pas favorisé son creusement. A cela, s'ajoute quelques "tartarinades", car Tarascon, en amont d'une quinzaine de km d'Arles, ne portait pas le projet dans son coeur, concurrence oblige...
Pour les barquiers du Midi, ce canal nous permettait d'éviter la traversée du Golfe de Fos pour atteindre Fos-sur-Mer, Port-de-Bouc, Martigues, Marignane et Marseille ainsi que l'étang de Berre.
C'est à la fin des années 1970, que les derniers bateaux du Midi, l'empruntèrent. Le fret était un engrais en vrac (ou produit chimique très corrosif, bonjour le nettoyage !) chargé à Toulouse pour le compte de l'O.N.I.A., future AZF, à destination de Marignane. Pour éviter le déchargement en zone portuaire, la "Coopé" avait organisé le transit au Pont-Clapets (Fos-sur-Mer). Le transport était alors devenu compétitif et rentable.
Le canal d'Arles à Fos débute maintenant à la "nouvelle (!)" écluse d'Arles construite dans les années 1910 (!), en vue d'un canal à grand gabarit. C'est dans le quartier Barriol, bien connu pour ses chantiers en bordure du Rhône (1882). Quelques "fluviales" (atlas type canal du Midi) y sont nées...
A droite sur la photo, le bâtiment bleu est une aile du Musée Départemental d'Arles Antique créé en 1995.Il contient des barges antiques et des informations sur le trafic fluvial en Pays d'Arles, déjà évoquées sur BaB (Expo : De L'amphore au conteneur, Musée de la Marine).
Cette écluse a une longueur de 190m environ, 12 m de large et une hauteur de 8 mètres environ. Cette hauteur participe au PPRI local (Plan de Prévention des Risques d'Inondations). Elle remplace l'écluse d'origine d'Arles (dite aussi de la Roquette), démolie à la fin des années 1960 / début 1970, lors des travaux de raccordements routiers avec la RN113.
L'ancienne écluse d'Arles :
C'est celle que l'on a connue !
Il ne reste de nos jours, que le début du musoir arrondi. Pour rentrer, on pouvait "s'y appuyer" dessus car l'autre côté "faisait plage".
Les locaux des ex Ponts & Chaussées : maison éclusière, bureaux, etc. sont toujours présents.
Lors du creusement de l'écluse (1833), du canal et du début du bassin de la Roquette, il avait été retrouvé le Cirque Antique d'Arles qui avait été introuvable jusqu'alors.
Les dimensions des écluses du canal d'Arles à Bouc étaient de 33m de long, sur 7m80 de large, autant dire que nos bateaux de 30m sur 5m50 étaient à l'aise ! pas besoin de replier le gouvernail !!
A un moment, il avait été question de les allonger à 38 m 50, là aussi, il n'y eut pas de suite...
Ci dessous, la sortie de l'écluse, on aperçoit au premier plan, le réa et la chaîne d'ouverture et de fermeture des portes. Cette écluse n'a jamais été modernisée car il y avait la grande qui allait être mise en service ...
Cette écluse avait un radier trop haut et lorsque le Rhône était bas, on ne pouvait pas rentrer dans l'écluse. Il fallait attendre un hypothétique lâcher d'eau ou une petite montée des eaux.
Dans le fret à destination de Marseille, il y avait des des "billons de peupliers", chargés dans "le Latéral", notamment à Montech (82), pour la S.E.I.T.A.* qui possédait une usine d'allumettes à Marseille. Pour passer, une solution consistait à les mettre à l'eau pour s'alléger et franchir le seuil de l'écluse. Ils étaient re-hissés le plus rapidement possible pour ne pas qu'ils s'imbibent d'eau.
* : Société (nationale) d'Exploitation Industrielle des Tabacs et Allumettes (1926). L'Etat avait alors le monopole.
Pour d'autres marchandises, comme des fûts de soude ou d'arsenic, du ciment (en sacs de 50 Kg) chargés à l'usine Lafarge de Fos-sur-Mer, le passage pouvait se faire en convoi de 3 bateaux par échanges d'allèges, quelques allers et retours et beaucoup de solidarité et d'huile de coude !!
Il arrivait parfois, qu'après avoir "mascagné" plusieurs jours, le Rhône remonte suffisamment pour "passer comme une fleur". "On a apatégé pour rien ! "... Je pense que nos amis Rhodaniens ont vécu pareils déboires dans d'autres lieux et plus souvent que nous !!
Les mariniers regardaient cette grande écluse, quelque peu désabusés "qu'attend-t-on pour la mettre en service ?", alors qu'une langue de terre la séparait du Bassin de la Roquette.
La carte postale ancienne ci-dessous, montre une barque du midi, qui se dirige vers l'écluse. Les 2 chevaux, l'un derrière l'autre, reliés à "la maillette" par "les renardes" est une des caractéristiques des relais des Canaux du Midi.
Remarque : la rangée de cyprès protège du vent, c'est courant dans le pays du vent.
Continuons le canal...
Après avoir franchi le Pont Réginel (en béton), on arrive au pont du chemin de fer qui reliait Arles à Port St Louis du Rhône. A l'origine c'était un pont tournant. Une bonne part du tracé de cette voie ferrée unique, longeait le canal, aujourd'hui elle est désaffectée.
Quand le bief était bas, il nous arrivait de "rester empégués" sur les 2 "tocs" qu'il y avait de part et d'autre des ponts. Un bout était porté à terre avec le "sapinou". Heureusement, que le treuil "Mouchenic" (guindeau de l'ancre) était efficace, avec quelques gouttes de sueur en prime, car bien sûr, ça se produisait en périodes de sécheresse (et d'arrosage)... Bon là, on n'avait pas le coeur à immortaliser la scène par des photos...
Passé les ponts, on se dirige vers l'écluse N°2 de Montcalde.
Des bateaux logements, dont certains sont bien cachés par la végétation, jalonnent le parcours.
Ci dessous, la "lanterne rouge" (le dernier) du groupe et peint en rouge !!
Tout à côté du canal, passe le "Saumoduc Vauvert-Lavéra" qui bien sûr n'existait pas de notre époque.
Vauvert (30) est à 6 km environ de Gallician en bordure du canal du Rhône à Sète. Une aire d'attente est en construction (voir article BaB).
Ce saumoduc amène la saumure du gisement salifère de Vauvert à une usine chimique de Fos-Bouc-Lavéra. qui en extrait du chlore, de la soude et de l'hydrogène.
Comme quoi, il n'y a pas que le rail et la route qui concurrencent le transport fluvial, les tuyaux aussi !!!
Ce canal est donc une partie du canal d'Arles à Bouc, amputé d'une quinzaine de km.
Pour résumer, le chapitre, ci dessous l'ex bief d'Arles à Montcalde :
Salut Lougabier.
Encore un super article, et sur cette bonne ville d'Arles, la Capitale pour certains mariniers qui y avaient leur" pied-à-terre", dont mes parents. Je prendrai un peu de temps pour le lire et faire un éventuel commentaire.